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J’écrirai demain. Pour donner la réplique à la harangue de la mort.

J’écrirai demain pour raconter ce paradoxe : j’étais brouillé avec la Reine. Je n’aimais pas ses choix. Je n’aimais pas la femme politique qu’elle était devenue. Je n’aimais qu’elle ait presque tué la Diva dans des postures politiciennes que je pensais blasphématoires pour son art.

Je pense qu’égoïstement, je ne lui pardonnais également pas qu’elle ait assisté, sans doute impuissante au travail profanateur des griffes du temps, à leurs sillons tumultueux sur sa peau, et aux vagues de boursoufflure.

Demain, j’écrirai que si j’ai été si sévère avec elle, c’est sans doute parce que j’ai tant rêvé cette femme dans les jeunes années de mon adolescence, j’écrirai qu’il y avait en elle la beauté des traits fins, le port altier de sa tête mutine, et sa prestance de reine.

Demain je dirai qu’elle a, sans doute, dessiné l’image de la femme fantasmée pour mon jeune esprit et que sa danse de liberté m’a fait apprécié la femme libre d’esprit et un peu subversive.

Demain, je dirai que j’aimai l’artiste et son travail formidable pour notre culture, sa modernité avant-gardiste, sa voix qui promettait déjà de traverser le temps et de s’inscrire définitivement dans le firmament de notre mémoire collective.

Demain, je dirai cette alliance qu’elle a rendue naturelle entre la femme enracinée dans sa culture traditionnelle, musicale en l’espèce, et la femme pleinement assise dans le siècle présent.

Demain, je dirai tout l’amour que je lui voue, demain je dirai que même protestant contre ces postures politiques, j’ai apprécié malgré moi qu’elle ait été là aussi une personne entière, authentique et libre, qu’au moment où tant de soutiens des Kabila ont traversé à la faveur du basculement du pouvoir, elle soit restée jusqu’au bout loyale, fidèle et finalement la femme que j’aimais.

Demain, je dirai que je pleure mais que la conviction qu’elle est une de ces personnes destinées à demeurer éternelles, essuie mes larmes.

Demain, j’écrirai des stèles de mots et des mausolées en textes, qui diront que cette femme était sans doute, l’une des meilleures d’entre nous.

 

Va en paix. Moi j’ai fait la paix avec toi.

 

@Biatitudes, 10 décembre 2022.

 

#tshalamuanabre 2022.

 

#tshalamuana

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