La question du dialogue avec les criminels congolais et étrangers, qui sèment la mort et la désolation dans certains coins de la RDC depuis plus d’un quart de siècle, agite les Congolais.
L’est du pays a basculé dans l’instabilité chronique depuis le génocide de 1994 au Rwanda.
Après un “règne” de 18 ans, Joseph Kabila a quitté le pouvoir en laissant derrière lui un pays où opéraient près de 120 groupes armés, si on s’en tient aux chiffres publiés par des organismes spécialisés qui suivent de près cette situation, comme le Congo Research Group.
Si sous la présidence de Félix Tshisekedi, il y a eu des vagues de redditions, le nombre de ces groupes armés n’a pas considérablement baissé pour autant.
Joseph Kabila semblait privilégier l’intégration au sein des forces armées congolaises de criminels issus de ces mouvements armés. C’est ainsi que des “militaires” sans véritable formation ont, par ce biais, rejoint les forces armées.
Cette approche a toutefois montré ses limites et ses incongruités. Devenus, du jour au lendemain, des éléments de l’armée régulière, ces criminels blanchis se comportent souvent n’importe comment.
L’erreur fatale de Kinshasa serait de mettre tous les groupes armés dans le même panier. Et de considérer qu’ils se valent tous.
Les ADF et le M23 pour ne citer que ces deux cas, ont commis tellement de crimes qu’il serait un peu trop facile qu’après une négociation faite de concessions mutuelles, ils s’en tirent à bon compte, sans répondre de leurs méfaits. On a longtemps sacrifié la justice sur l’autel de la réconciliation nationale. Pour quel résultat ?
Quel message les autorités congolaises enverraient-elles aux Congolais en voulant coûte que coûte trouver une issue négociée à une situation sécuritaire explosive, exacerbée également par des complicités internes qui se ramifient jusqu’au sein de la population civile ?
La solution à inventer n’est pas facile. Mais elle passe aussi, inéluctablement, par la réforme de l’armée congolaise qui est minée par les intérêts mafieux divergents de certains de ses dirigeants dont la loyauté est sujette à caution.
Cette armée compte dans ses rangs des hommes qui ont servi sous les drapeaux au… Rwanda.
Est-il interdit de s’attaquer frontalement à ce problème ? Est-ce un débat tabou ? L’Assemblée nationale est-elle tellement pétrifiée qu’elle n’ose pas soulever le couvercle de la marmite pour voir ce qui bout dedans ?
Il est temps qu’on sache, une bonne fois pour toutes, qui a fait quoi pour se retrouver au sein des forces armées. Le parcours de chaque élément doit être passé au crible avant qu’on ne sépare le bon grain de l’ivraie. Cette opération pourrait se réaliser rapidement à l’échelle nationale si on s’appuie sur un outil numérique performant. Une purge s’impose, de toute façon.
Le M23 est un cheval de Troie de Paul Kagame, le monstre froid qui s’est emparé du pouvoir en 1994 au Rwanda, dans un climat d’horreur créé par le génocide.
Paul Kagame, qui lorgne l’est de la RDC depuis des décennies, notamment pour des raisons économiques évidentes, n’est pas un voisin comme les autres. Je ne le dirai jamais assez : de mon point de vue, la RDC et le Rwanda ne pourront pas entretenir de relations “normales” tant que Paul Kagame sera aux commandes du pays des mille collines.
Pourtant, Félix Tshisekedi pensait faire de ce criminel, qui a du sang congolais sur les mains, un interlocuteur idéal pour faire triompher la cause de la paix dans la région.
Fatshi Bé… a-t-il enfin cerné la vraie nature du système mis en place à Kigali pour exploiter illégalement les abondantes ressources naturelles de l’est de la RDC ? Félix Tshisekedi s’est-il enfin rendu compte de sa propre naïveté ? A-t-il pris ses distances ?
Les analystes qui alimentent ses réflexions au palais de la nation se sont-ils penchés sur le parcours et les “hauts faits” de celui que Félix Tshisekedi considère, à tort, comme un “frère” ? Mieux vaut tard que jamais.
Négocier ? Hum… Oui, mais… Avec qui et pourquoi ? À Kinshasa de faire la part des choses et d’éviter tout aveu de faiblesse. On ne doit pas négocier avec l’ADF et le M23, un mouvement rebelle créé de toutes pièces par Paul Kagame et qui a toujours eu des soldats rwandais au sein de ses troupes.
La communication présidentielle doit, de son côté, être plus claire sur cette question, au lieu de donner l’étrange impression que Kinshasa, qui semble avoir du mal à assumer ses choix, hésite à appeler un chat un chat.
On a le sentiment que, pour l’heure, le palais de la nation envoie des signaux contradictoires sur cette délicate question. Hélas !
Arthur Malumalu