Le mouvement rebelle M23 impose de nouvelles contraintes fiscales aux agriculteurs des zones sous son contrôle. Une directive annoncée dans les églises ce dimanche oblige désormais les producteurs à abandonner leurs méthodes traditionnelles de mesure au profit d’un système de pesage standardisé.
Ce dimanche 20 juillet 2025, un communiqué a été lu simultanément dans toutes les églises des territoires contrôlés par le M23. Le message était clair : fini les assiettes, bassines et gobelets pour mesurer les récoltes. Les agriculteurs devront désormais quantifier leurs productions exclusivement en kilogrammes.
Cette stratégie de communication via les lieux de culte témoigne de la volonté du groupe armé d’atteindre massivement les populations rurales, majoritairement chrétiennes dans ces régions de l’Est de la RDC.
Sur le terrain, cette directive provoque de vives réactions. Kavira N., agricultrice de la région, ne mâche pas ses mots :
« Personnellement, je pense que cette décision est vouée à l’échec pour plusieurs raisons. Nous, agriculteurs, sommes habitués aux mesures approximatives. Imposer un système standardisé ne fonctionnera pas, car même avec le gouvernement par le passé, on avait tenté la même chose et la population était revenue à ses anciennes habitudes’
L’agricultrice explique sa crainte de voir ses revenus diminuer :
«En tant qu’agricultrice, je me sens à l’aise avec mes mesures approximatives. Si je prends un sac à bande rouge qui pèse entre 135 et 150 kg, j’en tire 80 dollars américains avec des bénéfices et du surplus. Je crains qu’en vendant aux grossistes au kilogramme, je ne fasse des pertes. »
Sa conclusion est sans appel :
« Cette mesure ne réussira pas selon moi. Ils peuvent toujours rêver, à défaut d’aller eux-mêmes cultiver les champs. »
Kahindo C., autre productrice, dénonce l’accumulation des taxes : « On nous en demande beaucoup trop. Nous payons déjà 30 dollars américains pour chaque saison agricole par hectare, et maintenant on nous oblige à peser nos récoltes. C’est très contraignant compte tenu de nos maigres revenus agricoles. »
Ces 30 dollars par hectare et par saison représentent déjà une charge considérable pour des agriculteurs dont les revenus restent précaires dans cette région instable.
Tous les producteurs ne s’opposent cependant pas à cette mesure. Bahati E. y voit certains avantages : « Il est préférable d’utiliser une mesure standard, car au moins je pourrai savoir exactement combien je gagne et combien je dépense. »
Cette nouvelle réglementation s’inscrit dans une stratégie plus large du M23 visant à structurer son contrôle économique sur les territoires occupés. En standardisant les mesures, le mouvement rebelle facilite la perception de ses taxes et renforce son administration parallèle.
Pour les agriculteurs, cette mesure représente une contrainte supplémentaire dans un contexte déjà difficile, marqué par l’instabilité sécuritaire et la multiplication des prélèvements illégaux.
Les autorités congolaises n’ont pas encore réagi officiellement à cette nouvelle disposition imposée par le groupe armé.
